Rav Shaoul David Botschko – La mitzva de la semaine : Parachat Michpatim – Eviter l’excès de scrupule

La Thora nous enjoint de ne pas nous laisser entraîner par une majorité animée par un esprit de nuisance. Lorsque nous assistons à une querelle nous ne devons pas accepter la position majoritaire si elle contredit la morale (Chemoth xxiii, 2) :

« Tu ne suivras pas la foule pour faire le mal et tu ne répondras pas dans un litige dans le sens de la majorité, (pour faire fléchir le droit). Tu suivras la majorité (pour le vrai). »

Les Sages donne un sens supplémentaire au verset. Le verset traiterait des normes de fonctionnement du Sanhédrin, le tribunal suprême. Parfois, il suffit d’une majorité simple d’une voix et parfois on exige une majorité d’au moins deux voix. Ainsi dans un procès où la peine capitale est en jeu, le verset nous interdit de condamner à mort à une majorité d’une voix. Mais pour innocenter, il suffira d’une majorité d’une voix. La première partie du verset concerne le premier cas tandis que la deuxième partie du verset traite du second (‘Houlin 11a) :

« D’où vient cette affirmation dite par les Maîtres “suit la majorité” ? D’où avons-nous cela ? Parce qu’il est écrit : Tu suivras la majorité. »

Par exemple, si on trouve de la nourriture quelque part, sans indication quant à son statut de cachrouth, si la majeure partie de la nourriture servie à cet endroit est cachère, on peut manger la nourriture incertaine bien qu’il soit objectivement possible qu’elle ne soit pas cachère.

De même, bien qu’il soit interdit de boire le lait d’un animal taref, c’est-à-dire dont l’état de santé le condamne à court terme, lorsqu’on trait les vaches, on ignore si elles ont un défaut qui rendrait le lait prohibé. La halakha statue que même si un pourcentage donné des bêtes s’avère malade[1], si la majorité est saine le lait est permis.

Quelle est la logique des Sages ? Il est évident qu’au Sanhédrin ou dans n’importe quel tribunal, les avis seront partagés. Telle est la nature humaine : les gens diffèrent les uns des autres. Le risque est de se trouver incapables de trancher. La Thora nous instruit de suivre la majorité du tribunal concerné. Une certitude à 100% étant quasiment impossible à atteindre, l’exiger reviendrait à paralyser toute prise de décision. De même qu’il y a lieu de suivre la majorité dans un tribunal, demain devons-nous agir dans la vie courante. Chez certains, le scrupule rend indécis ; peut-être serais-je en faute si j’agis ainsi et qu’en réalité il fallait interpréter autrement les données. La Thora nous rassure. Je sais, dit-elle, que vous n’êtes que des hommes. Il vous est impossible d’être absolument sûrs.

La Thora ne veut pas qu’en matière de halakha nous nous laissions aller à toutes sortes de scrupules invérifiables. La halakha est décidée à la majorité, des scrupules exagérés ne doivent pas nous empêcher de vivre.