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Rav Shaoul David Botschko – La mitzva de la semaine : Parachat Devarim – « Vous n’aurez peur de personne »

Rav Shaoul David Botschko – La mitzva de la semaine : Parachat Devarim – « Vous n’aurez peur de personne »

L’un des sujets de la paracha concerne la fonction des juges qui devront juger « justement ». Cette injonction comporte de nombreux détails dont celui de n’avoir peur de personne (Deutéronome i, 17) :

« Dans le procès, vous ne ferez point acception de personne ; vous entendrez le petit comme le grand ; vous n’aurez peur de personne car le droit appartient aux juges. Ce qui vous sera difficile, vous me le soumettrez et je l’entendrais. »

 Que signifie exactement qu’il soit interdit aux juges de craindre qui que ce soit ? La première explication consiste à dire que les juges ne doivent pas avoir peur d’un homme violent qui se présente au tribunal face à un être faible (Sanhedrin 6b) :

« Rabbi Yehouda ben Laqich enseigne : deux personnes se présentent au tribunal, l’un doux et l’autre brutal. Tant que tu n’as pas entendu leurs arguments ou après avoir entendu leurs arguments sans savoir encore vers où penche la justice, tu as le droit de leur dire : “je ne veux pas m’occuper de votre affaire” de peur d’être harcelé par le violent s’il venait à être condamné. Après avoir entendu leurs arguments, sachant maintenant qui a raison,  tu ne peux plus te désister, car il est dit “vous n’aurez peur de personne.” »

Le juge ne peut donc pas se détourner de son devoir. Il n’en n’a pas le droit ! Nous découvrons ainsi la difficulté de la fonction des juges. Ils doivent s’en tenir aux preuves qui leur sont présentées sans se préoccuper des remous parfois violents – dans la salle d’audience, dans la presse, dans les manifestations du public – qui cherchent à les influencer pour leur faire prendre parti pour l’un ou pour l’autre.

Tu dois poursuivre la vérité, même si c’est difficile et impopulaire.

Le Talmud nous apporte encore un autre enseignement qui concerne tous les Maîtres (Sanhedrin 6b) :

RabbiYehochoua ben Qor‘ha enseigne : d’ou [savons-nous] qu’un élève assis devant son Maître qui voit un argument en faveur du pauvre qui crée une obligation pour un riche, n’a pas le droit de se taire ? Parce qu’il est dit : “Vous n’aurez peur de personne.” Rabbi ‘Hanïn enseigne : ne tais pas tes paroles à cause de quiconque. »

Le Talmud nous donne ici deux explications concernant, d’une part, la signification de l’interdiction d’agir par peur et, d’autre part, de qui est cette personne, ce « quiconque » qui provoquerait cette peur.

Rabbi Yehochoua ben Qor‘ha parle de la peur du « riche ». L’élève a découvert un argument en défaveur du riche. Il n’a pas le droit de se taire par peur du riche. Interprétant le mot que nous avons traduit jusqu’à présent par « avoir peur » et le rattachant à une racine qui signifie « engranger », Rabbi ‘Hanïn ajoute que l’élève ne doit avoir peur de personne, pas même de la personne du président du tribunal, et se taire, enfouir ses paroles en lui-même, par peur, par respect… Tu n’as pas le droit de te taire sous prétexte qu’il est plus grand que toi, certainement plus savant, plus compétent… ça va me faire des ennuis… Non. Le dernier mot revient à la vérité et tu dois donc présenter tes arguments et tes preuves. C’est pour cela que dans ce verset le mot « juges », Elohim, désigne d’abord Dieu Lui-même, parce que c’est à Lui seul qu’appartient le droit, c’est-à-dire la vérité du jugement. Nul ne peut prétendre que seule sa parole exprime la Loi de la Thora. C’est ainsi que le traité talmudique Horayot établit qu’un élève qui, ayant constaté que le Sanhédrin s’est trompé, obéit néanmoins à sa décision est coupable. Il aurait dû suivre la loi de vérité.

De nos jours aussi, la discussion visant à l’établissement de la halakha doit s’en tenir aux données réelles et objectives, libre des idéologies et du prestige des intervenants.

Vous n’aurez peur de personne !