Rav Shaoul David Botschko – Parachat Kora’h – Querelle
La mitzva de la semaine : Parachat Kora‘h
Querelle
La paracha relate la révolte de Kora‘h contre l’autorité de Moïse et kéhouna – on traduit « la prêtrise » – d’Aharon. Le jugement de Dieu condamne Kora‘h et sa clique à être engloutis par la terre mais le peuple continue à contester la haute fonction dévolue à Aharon et à ses fils et Dieu ordonne de perpétuer le souvenir de ce qui s’est passé afin de mettre fin à toute contestation future (Nombres xvii, 4–5) :
« Eleazar le cohen prit les encensoirs d’airain approchés par ceux que le feu divin avait consumés et il en fit un plaquage pour l’autel, mémorial pour les Enfants d’Israël afin qu’aucun homme étranger à la descendance d’Aharon ne s’approche pour faire fumer de l’encens devant Hachem et il ne sera pas comme Kora‘h et sa clique, ainsi qu’Hachem lui a parlé par l’entremise de Moïse. »
La fin du verset nous enseigne qu’il est interdit de faire comme Kora‘h et de porter atteinte à ceux que Dieu a désignés pour diriger le peuple d’Israël. Les Sages du Talmud ont étendu cette loi à toutes les querelles intéressées (Sanhédrin 110a) :
« Car Rav a enseigné – quiconque fomente et perpétue une querelle transgresse un interdit, puisqu’il est dit : “et il ne sera pas comme Kora‘h et sa clique.” »
Et c’est ainsi que rabbi Isaac de Corbeil le rapporte dans son court-traité des mitzvoth (Séfer Mitzvoth Qatane, mitzva 132) :
« Ne pas contester la kéhouna puisqu’il est écrit (Nombres xvii, 5) “et il ne sera pas comme Kora‘h etc., et cela implique aussi que le tenant de la querelle qui conteste la kéhouna ne soit frappé de lèpre comme le roi Ouzia. »
Cependant, selon Maïmonide, le verset ne contient pas d’interdiction mais seulement une déclaration affirmant que les contrevenants ne seront plus châtiés durement comme Kora‘h l’a été (Séfer ha-Mitzvoth, 8ème Principe) :
« Et ils ont dit qu’il ne sera pas comme Kora‘h et sa clique, ce qui est une négation, et les Sages ont expliqué qu’il s’agit d’une négation, à savoir que Lui – qu’Il soit exalté – nous a fait savoir que celui qui contesterait la kéhouna et s’y opposerait ne subirait pas ce qui est arrivé à Kora‘h et à sa clique qui ont été engloutis pas la terre ou consumés par le feu d’En Haut, mais que son châtiment serait tel qu’Hachem l’a annoncé par l’entremise de Moïse, c’est-à-dire la lèpre. »
Il semble que Maïmonide n’ait pas voulu tirer de ce verset que la querelle serait interdite d’une manière absolue comme l’interdit de l’assassinat ou du brigandage qui ont une valeur universelle (bien qu’ils y aient des exceptions).
La controverse peut être féconde lorsqu’elle ne dégénère pas en querelle violente. Parfois, il est nécessaire de s’élever contre les fauteurs d’iniquité et il n’y a pas lieu d’accuser les protestataires de provoquer des querelles.
C’est en fait une question délicate : quand est-on dans l’obligation de protester, appliquant ainsi le commandement de la tokha‘ha, la réprimande, et quand faut-il s’en abstenir pour ne pas multiplier les querelles ? Il n’existe pas de réponse univoque à cette question, car chaque situation constitue un cas particulier. Il faut une étude sérieuse et approfondie avant de se lancer dans une telle querelle, peser consciencieusement les valeurs de notre sainte Thora afin de ne pas tomber d’une part dans la faute d’indifférence rt de devenir complices du crime et de ne pas tomber d’autre part dans un interventionnisme exagéré et incendiaire.
Prions de ne pas être comme Kora‘h et sa clique.