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Rav Shaoul David Botschko – La mitzva de la semaine : Parachat Beréchit : Quels Tribunaux

Rav Shaoul David Botschko – La mitzva de la semaine : Parachat Beréchit : Quels Tribunaux

L’une des mitzvoth dite « des enfants de Noé »[1] est l’obligation d’établir des tribunaux. Rabbi Yo‘hanan et rabbi Yitz‘haq sont d’accord le verset qui fonde cette obligation (Genèse ii, 16) :

« Et Hachem Elohim ordonna à l’homme : de tout arbre du jardin manger tu mangeras. »

Mais ils discutent du mot capital du verset (Sanhédrin 56b) :

« D’où viennent ces mots ? Rabbi Yo‘hanan dit – parce qu’il est écrit “ordonna”. “Ordonna” désigne les juges. Lorsque vint rabbi Yitz‘haq, il enseigna – “Elohim” désigne les juges ! »

Selon Rabbi Yo'hanan s'il y a « ordre », c’est-à-dire que l'homme ne peut pas agir à sa guise et par extension, qu'il faut lois et des tribunaux pour juger de leur respect. Selon Rabbi Yitz'haq le mot qui désigne D-ieu se dit Elohim qui signifie aussi juge. S'il y a D-ieu, il y a des règles. Le Rema[2]  (Responsa 10) explique quelle différence pratique y a-t-il dans cette controverse :

« … Il nous semble que l’origine de la controverse entre rabbi Yo‘hanan et rabbi Yitz‘haq est aussi claire que le soleil à midi. Rabbi Yo‘hanan qui se fonde sur le verbe “ordonna” considère que les enfants de Noé n’ont d’autre obligation que d’observer leurs lois coutumières, lesquelles sont différentes de celles données à Israël au Sinaï, et de juger loyalement [les disputes] entre l’homme et son frère et l’étranger. Un autre esprit anime rabbi Yitz‘haq qui se fonde sur le mot “Elohim” (qui, dans la Thora, désigne aussi bien Dieu que les juges). Il considère que bien que les enfants de Noé n’ont à obéir qu’à sept lois, celles-ci sont identiques à celles reçues par Israël au Sinaï et tout est un. C’est ainsi qu’il nous semble devoir expliquer ce passage. »  

Par la suite, il tranche en faveur de rabbi Yitz‘haq, disant que les nations doivent aussi juger selon le droit hébraïque, c’est-à-dire puiser les principes de la justice à la source des commandements donnés à Israël au Sinaï, tels qu’ils sont élaborés par le Talmud et déterminés par le Code du Choul‘han ‘Aroukh.

Cela pose le principe de l’universalité du droit hébraïque. Considérons en particulier deux règles importants :

  1. Nul ne se déclare « méchant », c’est-à-dire que nul ne s’inculpe lui-même.
  2. L’aveu du défendeur vaut cent témoins.

Nos Sages établissent une distinction entre le dédommagement d’une victime (droit civil) et la condamnation d’un coupable (droit pénal). Celui qui reconnait avoir lésé son prochain, par une dette impayée ou un dommage matériel quelconque doit le dédommager et le tribunal le condamnera à le faire. Mais le tribunal ne tiendra aucun compte des déclarations d’un prévenu qui avouerait avoir commis une transgression.

Cette règle est fondamentale parce qu’elle est de nature à éviter l’erreur judiciaire. Par exemple, un certain Amiram Benoliel a été récemment condamné sur la foi de ses aveux, obtenus sous la torture. Selon le droit hébraïque, la torture ne servirait à rien car les aveux, même spontanés, n’ont aucune valeur juridique.

Il y a près de 4 000 ans, la Thora nous a donné les fondements d’une justice valable pour l’humanité entière.


[1] Les sept mitzvoth des enfants de Noé sont les obligations morales fondamentales de l’humanité.

[2] Moshe Isserlès, dit le Rem"a est un éminent rabbin, talmudiste, philosophe et décisionnaire polonais du XVIᵉ siècle. Il est la source de la tradition halakhique Ashkenaze