La paracha dans le midrash par le Rav Shaoul David Botschko – Parachat Beréchit : Qu’est-ce qui a été créé en premier ?
La paracha commence par le récit de la création (Genèse i, 1–3) :
« Au commencement Elohim a créé les cieux et la terre. Et la terre était vide et chaos et l’obscurité sur la face de l’abîme et le souffle d’Elohim planait sur la face des eaux. Et Elohim dit : que soit lumière et il fut lumière. »
Il semble, à simple lecture, que le monde (les cieux et la terre) ont précédé la lumière. Mais, dans le midrach (Beréchit Rabba iii, 1), rabbi Yehouda et rabbi Néhémia discutent :
« Rabbi Yehouda dit : la lumière a été créée d’abord. C’est semblable à un roi qui souhaitait construire un palais et l’emplacement était obscur ; qu’a-t-il fait ? Il a allumé des lampes et des flambeaux pour savoir comment placer les fondations. De même, la lumière a été créée d’abord. Et rabbi Néhémia dit que le monde a été créé d’abord. C’est comme un roi qui a construit un palais et l’a décoré de lampes et de flambeaux. »
Donc, selon rabbi Yehouda, la lumière du verset 3 a été créée avant les cieux et la terre. Les deux premiers versets font office de titres et la création effective commence au verset 3. Rabbi Néhémia, quant à lui, maintient l’ordre chronologique en conformité avec l’ordre des versets et les cieux et la terre ont été créés en premier.
De quoi ces tanaïm discutent-ils ?
Rabbi Yehouda considère la relation entre Dieu et la réalité. La lumière représente toutes les valeurs qui éclairent le monde et sans lesquelles la vie n’aurait pas de sens. Ces valeurs doivent apparaître en premier et la création doit en être le reflet. Le monde minéral, immuable, est l’expression de la vérité intangible ; le monde végétal est l’expression de la bonté comme ces plantes qui procurent l’ombre protectrice et les fruits nourrissants. Le monde de la vie animale est l’expression de l’élan vital indispensable à l’existence. L’homme apporte la valeur de la liberté, du libre arbitre, par lequel il est « à l’image de Dieu » car la création exige la responsabilité de la créature.
Pour rabbi Yehouda, la créature étant l’expression de la lumière divine dans le monde, il y a une espérance réelle pour le monde que le bien finisse par triompher du mal puisque le monde a été créé comme expression de la lumière divine. Lorsque la hassidout affirme que toute la réalité est divine, elle entend par là que toute la réalité créée est l’expression de valeurs sublimes. Et le mal n’existe dans le monde qu’en résultat de la liberté octroyée à l’homme.
Tel n’est pas l’avis de rabbi Néhémia. Hachem a créé le monde et le monde est fondamentalement autre et distinct de Lui. Grande est donc la responsabilité de l’homme à qui le monde a été confié. Le Créateur vient en aide à l’homme. Il a suscité le peuple d’Israël et lui a donné la Thora qui est le flambeau qui éclaire le monde. Israël lutte pour élever le monde et en faire une réalité digne d’avoir été créée. Le monde commence par être chaos et obscurité sur la face de l’abîme. Le mal emplit le réel car elle n’est pas lumière et celle-ci – la Thora – a été formée par le Saint, source des bénédictions, et a été donnée à l’homme pour lui permettre de mener à bien la mission qui lui a été donnée : conduire le monde à son achèvement.
La discussion de ces Maîtres porte donc sur la question de savoir qui est responsable de l’achèvement du monde. Le Créateur qui l’a créé à partir de Sa lumière ou Israël qui a en reçu mission ?
Tous les deux ont sans doute raison.
À la sortie d’Égypte, la réalité était divine et Hachem a combattu l’Égypte pour remettre le monde sur les rails que les Égyptiens avaient tordu, ce qui est conforme à l’avis de rabbi Yéhouda. De nos jours, alors qu’Israël combat le mal absolu avec une infinie bravoure et un dévouement sans limites, la perspective est celle de rabbi Néhémia. Nous sommes responsables du monde et Hachem, dans Sa grande bonté, éclaire et protège Ses fils qui apportent la lumière au monde.