Rav Nahum Botschko : Beréchit – Se renforcer par les épreuves
La description de ce qu’on désigne communément par la « création du monde » se trouve répartie sur six jours ; à la fin de certains d’entre eux il est dit « et Dieu vit que c’était bon ». Et au terme de l’œuvre : « et Dieu vit tout ce qu’il avait fait, et voici que c’était très bon. » Ce verset a donné lieu à de nombreux midrachim.
A simple lecture, il semble que l’expression « très bon » est de nature positive. Mais plusieurs d’entre les midrachim ont donné ici une explication contraire.
En voici quelques exemples (Béréchit Rabba IX, 5-7) :
« rav Chmouel bar Nahman a enseigné au nom de rabbi Méir – « voici que c’était très bon », voici que la mort est bonne.
Rabbi Nahman bar Chmouel au nom de rav Chmouel bar Nahman a dit : « Voici que c’est bon », c’est le penchant au bien. « Voici que c’est très bon », c’est le penchant au mal.
Rav Houna a dit : « Voici que c’est bon », c’est la mesure de bien. « Voici que c’est très bon », c’est la mesure des souffrances.
Rav Chmouel bar Abba a dit : « Voici que c’est bon », c’est la mesure de bien. « Voici que c’est très bon », c’est la mesure des châtiments.
Et c’est apparemment chose curieuse que tant de commentaires traditionnels expliquent l’expression « très bon » dans un sens négatif. Rabbi Mochè Hayim Luzzatto dans son ouvrage Daat Tévounoth (§124) compte cinq raisons pour lesquelles l’homme rencontre des difficultés, des épreuves, des souffrances et des choses pénibles :
1. Concrétisation de la lumière de la plénitude : ce n’est que dans une réalité où règne l’obscurité qu’il est possible de connaître et d’estimer la supériorité de la lumière, comme la réconciliation après la dispute ou la paix après la guerre.
2. La mise en évidence de l’Unité : la plénitude appartient au seul Créateur ; en dehors de lui, règnent corruptions et le mal.
3. La rétribution de qui surmonte les épreuves.
4. Celui qui choisit le bien et repousse le mal rédime la création par ses actes et devient l’associé de Dieu dans le monde.
5. Le renforcement de la confiance chez les hommes justes et droits qui restent fermes dans l’épreuve du voilement du Visage dans le monde et dont la foi est constante. Surmonter l’épreuve de la foi contre tous les écrans et difficultés renforce les justes. De même que la foi d’Abraham notre père qui reçut l’ordre d’aller au pays de Canaan avec l’assurance qu’elle lui reviendrait et y réussirait, et voici que lorsqu’il y arrive il se trouve obligé d’en repartir à cause de la famine qui y sévit. Abraham a surmonté l’épreuve et s’en est trouvé plus fort – « le juste vivra en sa foi ».
D’après cela, les raisons pour lesquelles les midrachim expliquent « très bon » comme se référant aux souffrances et aux problèmes deviennent claires. L’homme croît et se renforce par les épreuves et les difficultés, de même que l’enfant apprend à marcher grâce à chacune de ses chutes.
Chacun d’entre nous, s’il observe les problèmes qu’il a traversé durant sa vie pourra constater que même les cas qui au moment où il les vivait lui ont paru particulièrement durs, le fait même de s’y confronter, lui ont été profitables et qu’il en est résulté de bonnes choses. «Et Dieu vit tout ce qu’il avait fait, et voici que c’était très bon» – c’est-à-dire que celui qui regarde la réalité avec des yeux divins voit les problèmes et les souffrances comme «très bonnes» ou qu’il en germera à l’avenir des choses très bonnes.