Vayakel – Les instructions pour le Chabbat et le Sanctuaire
Rav Nahum Botschko
Au début de la paracha, Moïse rappelle les commandements du chabbat avant de transmettre à Israël les instructions concernant l’édification du sanctuaire. Ce rapprochement entre le chabbat et le sanctuaire était déjà apparu dans la paracha Ki Tissa.
De ce rapprochement, nos maîtres apprennent d’une part que malgré l’importance du sanctuaire, l’urgence de sa construction ne repousse pas le chabbat et, d’autre part, la nature des travaux qui y seront interdits: ce sont précisément les travaux nécessaires à cette construction.
La guémara (Chabbat 49b) dit expressément: «car on enseigné dans une baraïta qu’on n’est passible de sanction que pour un travail qui avait son pareil dans le sanctuaire.»
Or, cela ne va pas de soi! quel rapport existe-t-il entre les travaux de construction du sanctuaire et les travaux interdits le chabbat? la juxtaposition de quelques versets est-elle cause de l’interdiction de ces travaux et pas d’autres?
Le rabbi de Loubavitch, rabbi Menahem Mendel Schneersohn, enseigne (recueil d’entretiens sur Vayaqhel): «le fait même que les trente-neuf travaux s’apprennent de la construction du sanctuaire implique que ces trente-neuf travaux sont liés à la construction du sanctuaire.» C’est là un principe fondamental dans toutes les relations établies par la Thora orale entre des sujets apparemment étrangers l’un à l’autre, que ce soit au moyen de la parenté sémantique, par raisonnement a fortiori, par déduction ou tout autre méthode exégétique, cela met en évidence un lien profond et essentiel entre les sujets considérés.
Ainsi dans le cas qui nous occupe, explique le Rabbi, «la racine des trente-neuf travaux ce sont les travaux de construction du sanctuaire.»
Examinons cela de plus près. Nous savons que les travaux interdits le chabbat sont ceux qui servent à aménager et à améliorer le monde et non à l’abîmer. Les sages ont formulé cela en disant: c’est une melékhet ma‘hachevet que la Thora interdit. Melékhet ma‘hachevet, c’est-à-dire une opération complexe en ce qu’elle implique la mise en œuvre des moyens pour la réalisation d’un projet, ce qui pourrait être rendu par «travail réfléchi». C’est la raison pour laquelle toutes les opérations qui abîment, détruisent, sont a priori exemptes de sanction. Et il existe encore de nombreux principes allant dans le même sens.
Si les travaux du chabbat se déduisent des travaux de ceux nécessaires à la construction du sanctuaire, cela signifie que le travail par excellence, c’est le travail d’édification du sanctuaire. C’est là l’activité principale de l’homme, le travail qui permet à la Présence divine de résider sur terre. Ces travaux sont d’importance capitale, et c’est pour cela qu’ils sont interdits le chabbat.
Mais si nous allons au bout de ce raisonnement, si un travail est sans importance s’il ne sert pas à la construction du sanctuaire, quel est le sens de notre action maintenant en l’absence du Temple?
Le Rabbi explique: «c’est pourquoi le but et la finalité de tous les travaux, même ceux qui sont facultatifs, c’est de réaliser, grâce à eux, une résidence pour Sa Présence, ainsi qu’il est écrit: «en toutes tes voies, connais-Le.»
Autrement dit, étant donné la relation essentielle et réciproque entre les travaux de construction du sanctuaire et les travaux interdits le chabbat, travaux positivement prescrits à réaliser les jours ouvrés[1], par notre activité quotidienne visant à construire un foyer conforme au projet de la Thora, nous œuvrons à devenir des hommes, des familles et des demeures qui sanctifient le Nom de Dieu dans le monde, à la manière même dont l’œuvre du sanctuaire réalisé par Israël rend possible à Dieu d’y faire reposer sa Présence.
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[1] Rabbi Eliezer a ardemment souligné la valeur du travail (Avoth de Rabbi Nathan, version II, 21): «grand est le travail, car de même qu’Israël s’est vu prescrire le chabbat, de même le travail lui a-t-il été prescrit, ainsi qu’il est dit: six jours tu travailleras et tu réaliseras ton œuvre, et le septième jour, [ce sera] chabbat pour Hachem ton Dieu.»