Tetsavé– L’autel des parfums
Rav Nahum Botschko
Les parachiyoth Térouma et Tétzavé contiennent les prescriptions concernant la construction du sanctuaire, de son mobilier, de ses vases et des habits des prêtres. Ensuite, elles instruisent Moïse au sujet de l’intronisation des cohanim durant les sept jours de préparatifs (milouïm). Cette description s’achève par l’assurance donnée par Dieu que sa Présence résidera au sein des enfants d’Israël (xxix, 45-46). Il semblerait que tout ait déjà été dit quant au sanctuaire quand le texte semble se reprendre et donner tout soudain de nouvelles instructions : construire l’autel des parfums.
Pourquoi ces instructions n’ont-elles pas été données avec toutes les autres ? Pourquoi ont-elles été repoussées jusqu’après l’assurance donnée que la Présence divine résiderait en Israël ?
du sanctuaire est d’assurer la Présence de Dieu au milieu du peuple d’Israël, lui permettant de faire l’expérience directe de la proximité divine. Mais pourtant, le peuple a le sentiment que cette proximité est dangereuse : « quiconque s’en approche meurt ! » (Nbres xvii, 28)
La sainteté du sanctuaire est telle qu’elle met en péril ceux qui s’y aventurent insuffisamment ou mal préparés. Nadav et Avihou, fils d’Aharon sont morts pour cette raison au jour même de l’inauguration. Le grand prêtre qui pénètre dans le Saint des saints au jour de Kippour court le même risque s’il ne s’est pas convenablement préparé. Même une simple pensée inadéquate peut rendre une offrande indigne d’être présentée sur l’autel. De même, la Thora exige une extrême attention pour tout ce qui touche tant aux détails de la construction du sanctuaire et de son érection que du service rituel qui devait y être effectué. C’est un grand mérite pour Israël que d’avoir le sanctuaire. C’est le lieu de la Résidence divine dans le monde. C’est un lieu d’autant plus délicat et sensible qui exige de grandes précautions et une extrême rigueur.
Après toutes les prescriptions concernant la construction du sanctuaire, la Thora dit (xxix ; 43) : « J’y rencontrerai les enfants d’Israël et il (le sanctuaire) sera sanctifié par Mon Honneur. » Rachi cite à ce propos le dire talmudique (Zevahim 115b) : « ne lit pas “par Mon Honneur” mais “par ceux que J’honore” ; il est fait allusion ici à la mort des fils d’Aharon au jour de l’inauguration du Sanctuaire. » Mais Moïse ne comprit l’allusion qu’après leur mort. Nahmanide explique que le fait que les instructions concernant l’autel des parfums soient écrites après l’annonce de la Résidence divine vient signifier à Moïse que les parfums de l’encens ont le pouvoir d’enrayer la colère encourue par Israël. Ainsi, dans la paracha de Qorah, lorsque le fléau commence à frapper, Moïse ordonne à Aharon de se placer avec l’encensoir entre les vivants et les morts et le fléau fut stoppé (cf. Nombres xvii, 8-15 et Chabbat 89a.) Le Zohar (iii, 18b) dit à propos de l’encens qu’il a pour fonction : « d’apaiser la colère. »
Qu’est-ce qui fait de l’encens « le calmant national » ? Le Zohar explique : l’encens unifie tout le monde à ne faire qu’un. Le mot encens, en hébreu, appartient à la racine QTR dont le sens en araméen est « lien », « relation ». L’encens contenait onze ingrédients, l’un d’entre eux étant le galbanum, essence à odeur fétide. Mais toutes les essences ensemble produisent un parfum agréable pour Dieu. Cela signifie que c’est la force de l’unité vraie où nul n’est oublié, pas même les réchaïm, qui provoque l’adoucissement des rigueurs du jugement.
Que pouvons-nous apprendre de cela pour la vie quotidienne qui est la nôtre ?
Il faut certes être attentif tant dans les grandes que dans les petites choses et s’efforcer de pratiquer les mitzvoth de la manière la plus exacte possible, comme nous en avons été témoins à propos des détails de la construction du sanctuaire qui rend possible la Présence. Mais il faut prendre garde à ce que cela ne porte en rien atteinte à notre amour pour tous les Juifs et pour chacun d’entre eux sans considération pour son comportement : seule la force de notre union nous garantira une parfaite protection divine.
Traduit Rav E. Simsovic