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Paracha Noa’h – « Tu entreras dans l’Arche…, Sors de l’Arche… »

Paracha Noa’h – « Tu entreras dans l’Arche…, Sors de l’Arche… »

Rav Nahum Botshko

L’humanité, au temps de Noah, était arrivée à un degré ultime de dépravation que la Thora décrit en ces termes (Genèse VI, 11) : « la terre s’était avilie devant Dieu et la terre s’était emplie de violence. » Brigandage, débauche et idolâtrie, disent les Sages, étaient devenus la norme de sorte que l’effacement de cette civilisation par le Déluge en fut la conséquence inéluctable.

Dieu ordonne alors à Noah (ibid., verset 18) : « tu entreras dans l’arche, toi, tes fils et ta femme et les femmes de tes fils avec toi. » L’humanité perdurera au travers de Noah et de sa famille qui seront sauvés à cet effet.

Les grands maîtres de la Hassidout et les grands moralistes soulignent la pertinence de ce récit pour toutes les générations. Il est en effet des situations où la société ambiante est lourdement viciée et pour nous soustraire à son influence néfaste nous devons nous mettre à l’abri dans une sorte d’« arche de Noé » pour nous protéger du déluge d’impureté et d’immoralité qui risquerait de nous submerger.

L’« arche de Noé » de notre temps est l’étude de la Thora, les centres d’étude, les yéchivoth et autres institutions d’enseignement traditionnelles.

Les Pirqé Avoth (IV, 28) nous adressent une mise en garde : « la jalousie, l’avidité et la poursuite des honneurs rejettent l’homme hors du monde. » Certains commentateurs expliquent que chacune de ces tendances à satisfaire des pulsions mauvaises se manifeste dans toute sa virulence à divers âges de la vie humaine :

L’avidité – vers l’âge de dix ans ;

La jalousie (et la poursuite des richesses) – de trente à quarante ans ;

La poursuite des honneurs – les années suivantes.

Le rabbi de Slonim, auteur du Nétivoth Chalom, enseigne que l’on trouve le remède à chacune de ces tendances en se plongeant dans la Thora afin de réorienter positivement les énergies qu’elles drainent.

L’arche de Noé comportait trois étages correspondant à ces trois dimensions (Nétivot Chalom, parachat Noah, le sens de l’arche pour l’histoire) :

« l’arche de Noé comportait un étage inférieur, un étage intermédiaire et un étage supérieur en relation avec trois périodes de la vie humaine… et le tiquoun1 procède toujours de la force de la Thora, בס »ד sorte d’« arche de Noé » grâce à laquelle nous pouvons relever à chaque étape de l’existence les défis qu’elle nous lance, qui protège le Juif dans les situations inférieurs, intermédiaires et supérieures, afin qu’il y ait toujours un recoin demeuré pur préservé de toute corruption, où il puisse s’élever vers Dieu… ce qui est la finalité de l’arche de Noé, de former un espace réservé à la sainteté, dont les barrières arrêtent l’expansion de l’impureté afin qu’elle ne puisse pas y pénétrer… »

Certains ont perdu tout espoir de pouvoir réformer, rédimer le monde. Ils ont « idéalisé » l’arche de Noé. Ils ont fait un mode de vie a priori de ce qui était une réaction a posteriori d’une situation problématique. Ils ont oublié que dans la suite de la paracha Dieu ordonne à Noah de sortir de l’arche, lui et sa femme et ses fils et les femmes de ses fils !

L’objectif de l’homme est de rédimer le monde. Après s’être « empli de Thora », de sainteté et de pureté, son rôle est de sortir de cette arche et de poursuivre son élévation au travers précisément de sa rencontre avec le monde et sa réalité concrète.

C’est ce qu’écrit le rav Kook dans Orot Haqodech (1ère partie, page 145) :

« La sainteté doit s’ériger sur la base de la réalité profane. Le profane est la matière première de toute sainteté et la sainteté est ce qui lui donne forme. Plus le profane sera puissant et plus la sainteté gagnera en dignité. »

La formule du rav Kook innove en ceci qu’elle met en évidence la dimension de véhicule de la sainteté qui est le propre du profane. C’est pourquoi il est nécessaire que le profane soit solidement établi afin que la sainteté puisse se manifester dans toute sa vigueur.

Et puisqu’il en est ainsi, afin de réaliser le service de Dieu dans toute sa plénitude, nous devons sortir de l’arche de spiritualité abstraite et nous devons nous rédimer au travers de la rencontre quotidienne avec la normalité de la réalité.

 

 

1 Il n’existe pas de terme, en français, qui rende exactement la signification et l’esprit de ce terme fondamental de la spiritualité hébraïque et juive. Il s’agit de l’effort de « mise en ordre » du chaos du monde, de sa moralisation, afin de l’amener à l’état en vue duquel le Créateur nous a appelés à l’Être. (NdT)

 

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