Ekev – Le Birkat Hamazone en 3 dimensions
Rav Shaoul David Botschko
Paracha Ekev : « Tu mangeras à satiété et tu béniras Hachem ton D-ieu pour la bonne terre qu’il t’a donnée »
Quelle bénédiction doit-on prononcer après avoir consommé les fruits, appelés « fruits d’Israël »? La Michna rapporte trois opinions:
« Celui qui mange des raisins, des figues ou des grenades, doit réciter les trois bénédictions (c’est-à-dire le Birkat Hamazon, prière dite à la fin d’un repas où l’on a mangé du pain), paroles de Rabbi Gamliel.
Les sages disent qu’il suffit de prononcer une bénédiction qui résume celles du Birkat Hamazon (on ne dit le birkat Hamazon complet que si l’on a mangé du pain).
Rabbi Akiba dit que même s’il n’a mangé qu’un légume, si celui-ci constitue son repas, il doit réciter les trois bénédictions.
C’est bien l’opinion de Rabbi Akiba qui semble la plus logique. Qu’importe ce que l’on mange, pourvu que l’on soit rassasié. C’est ce qu’exprime le verset: « Tu mangeras à satiété et tu béniras Hachem ton D-ieu… »(Deut. 8,10)
Pourtant la Halakha n’a pas retenu l’opinion de Rabbi Akiva, mais celle des Sages et l’on ne récite le Birkat Hamazon que si l’on mange du pain (de blé ou d’orge) »; pour les fruits d’Eretz Israël, une Bera’ha spécial « le Birkat Hamazon résumé » et pour les autres mets, on dit une Beraha courte, « Boré Nefachot ».
Une lecture complète du verset permet d’expliquer l’opinion des Sages:
« Tu mangeras à satiété et tu béniras Hachem ton D-ieu pour la bonne terre qu’il t’a donnée ».
Le Birkat Hamazon n’est pas seulement une bénédiction pour remercier D-ieu de la nourriture qu’Il accorde, mais est surtout une bénédiction pour louer le Tout Puissant d’avoir donné la terre d’Israël à Son peuple.
Le don d’Eretz Israël est un fondement de l’identité d’Israël. C’est pourquoi D-ieu demande qu’on s’en souvienne tous les jours. Notre Paracha rappelle qu’Eretz Israël a été bénie et qu’on y trouve des bons fruits et du pain en abondance:
« Car Hachem ton D-ieu t’emmène vers un bon pays, un pays plein de cours d’eau, de sources et de torrents qui s’épandent dans les vallées et les montagnes, un pays qui produit le froment et l’orge, le raisin, la figue et la grenade, l’olive huileuse et le miel, un pays où tu ne mangeras pas ton pain avec parcimonie, un pays où il ne manque rien; ses pierres y sont du fer et de ses montagnes, tu extrairas du cuivre, tu mangeras à satiété.
Aussi à chaque repas, chaque fois que l’on mange du pain, nourriture par excellence, mais aussi mets fabriqué avec du froment, produit qui rappelle la terre d’Israël, on bénira D-ieu pour le pays qu’il nous a donné. Rabban Gamliel pense qu’il en est de même pour tous les fruits mentionnés dans le verset. Pour Les Sages, certes, il faut faire une bénédiction spéciale pour ces fruits-là, mais on ne dira les trois bénédictions que si c’est à la fois le met constituant de base de la nourriture et un produit du froment ou du blé, produits qui rappellent Eretz Israël.
Durant tout son exil, le peuple Juif a été ainsi fidèle à son pays. Même lorsqu’il était pauvre et persécuté, il suffisait qu’il ait mangé un morceau de pain pour qu’il se souvienne de son antique patrie et qu’il en remercie le Tout Puissant. Il s’extirpait ainsi de son malheur et se réjouissait de son bonheur futur. Quel témoignage de fidélité et de confiance.
Le texte du Birkat Hamazon lui-même exprime la double signification de cette prière. En effet la première bénédiction est consacrée à remercier D-ieu qui pourvoit aux besoins de chacun « qui nourrit tout l’Univers dans Sa Bonté » et la deuxième est consacrée à Eretz Israël : « Nous te remercions pour la terre de délices, bonne et large que Tu nous a attribuée… »
Il faut s’interroger sur le sens de la troisième bénédiction. Elle est consacrée à Jérusalem. Quel est donc le rapport entre la capitale d’Israël et la nourriture?
Ce sont les versets qui suivent immédiatement qui apportent la réponse
« Prend bien garde de ne pas oublier Hachem ton D-ieu… de peur que tu manges à satiété, que tu te construises de belles maisons et que tu t’installes …et tu vas t’enorgueillir et tu risques d’oublier Hachem ton D-ieu qui t’a sorti d’Egypte. »
En d’autres termes lorsqu’on remercie D-ieu pour la bonne terre qu’il nous a donnée il ne faut pas oublier le but de notre mission en Eretz Israël, construire une société conforme à la Tora. Aussi, lorsqu’on rappelle Eretz Israël, on doit se souvenir en même temps de Jérusalem, le coeur d’Eretz Israël qui lui donne sa dimension spirituelle.
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