Yitro – Toujours rester dans le cadre des lois de la Thora
Rav Nahum Botschko
Le Talmud enseigne dans le traité Bérakhot (29b) :
« Le prophète Elie a dit à rav Yéhouda, le frère de rav Sala le ‘Hassid : ne te mets pas en colère et tu ne fauteras pas ; ne t’enivres pas et tu ne fauteras pas. Et lorsque tu te mets en route, prends conseil de ton Créateur. »
Le conseil d’Elie était donc de ne pas se mettre en colère parce que celle-ci entraine la faute et de même de ne pas boire des boissons alcoolisées parce qu’elles conduisent à fauter. Et il lui a aussi recommandé de « prendre conseil de son Créateur » lorsqu’il part en voyage, autrement dit, de réciter la prière du voyage – téfilat hadèrekh.
Quel rapport y a-t-il entre ces conseils ?
A priori, cela ressemble à une juxtaposition aléatoire d’éléments disparates sans relations entre eux !
Il existe cependant un dénominateur commun entre ces trois situations : elles correspondent toutes les trois à une rupture du cadre ordinaire de la vie quotidienne. Dès lors, le risque est grand de tomber dans la faute parce que les repères habituels – la famille, le cadre social habituel – ont disparu ou du moins sont devenus plus flous.
Le colérique, ainsi que le souligne l’expression habituelle, se met hors de lui. Il a quitté son cadre de pensée habituel. De même, sous l’emprise de la boisson, on ne se maîtrise plus. La raison ne dicte plus la conduite. Que de catastrophes ne se sont-elles pas produites, hélas !, dans ces situations où le contrôle convenable ne s’exerce plus !
Lorsqu’on prend la route, on quitte également l’espace habituel où l’on se meut. Tous les chemins, on le sait bien, sont réputés dangereux ! Il ne s’agit sans doute pas seulement des dangers physiques, matériels, auxquels s’exposent les voyageurs.
Le texte du Talmud implique bel et bien les dangers spirituels qui les guettent. Lorsqu’on quitte le milieu familial et social régulier qui constitue l’encadrement usuel du quotidien, on devient facilement la proie de toutes sortes d’épreuves qui sont loin d’être simples. C’est pourquoi le Talmud lance un avertissement à quiconque entreprend un voyage : « prends conseil de ton Créateur ! » C’est-à-dire, prépare-toi moralement et spirituellement ; enveloppe-toi de la crainte du Ciel comme d’une armure pour affronter ces situations inhabituelles, littéralement extra ordinaires, afin de te préserver de ces dangers spirituels.
Le Talmud de Jérusalem (Soucca iv, 3) rapporte une injonction semblable :
« on enseigne, rabbi Lévi a dit : pourquoi récite-t-on chaque jour la profession de foi du Chema‘ Israël ? parce que les Dix commandements y sont contenus. “Je suis Hachem ton Dieu – Écoute Israël”, “tu n’auras pas d’autre dieu – Hachem est Un”, “Tu n’invoqueras pas le Nom d’Hachem ton Dieu en vain – tu aimeras Hachem ton Dieu”. Celui qui aime le Roi, ne jure pas mensongèrement en invoquant son Nom ! “Rappelle le jour du chabbat – afin que vous vous souveniez et vous accomplirez tous Mes commandements”. Rabbi enseigne ! Il s’agit de la mitzva du chabbat qui équivaut à toutes les mitzvoth de la Thora…»
Qu’est-ce qui se cache dans ce midrach ?
La Thora nous prescrit de réciter soir et matin la profession de foi du Chema‘ Israël et rabbi Lévi nous dit que les Dix commandements y sont impliqués. Il en résulte que jour après jour, soir et matin, nous nous soumettons au joug de la Thora et des mitzvoth. Les Dix commandements sont le fondement de l’ensemble des mitzvoth, que ce soit celles qui régissent les relations entre l’homme et Dieu ou celles qui régissent les relations entre l’homme et son prochain. Toutes les autres mitzvoth en découlent.
Par la profession de foi du Chema‘ soir et matin, nous nous engageons à suivre la voie de la Thora de sorte que même lorsque nous quittons notre cadre habituel, soit par colère soit par ivresse – à Dieu ne plaise ! – ou tout simplement parce que nous partons en voyage, pour des raisons professionnelles ou autres, nous restons toujours sous la droite guidance de la Thora qui nous invite à la sainteté.
Emouna Ethique Guemara Halakha Prières Rav Nahum Botschko Tanakh