‘Hayé Sarah – Un témoignage d´amour
Rav Shaoul David Botschko
MARIAGE OU ACHAT
« D’où sait-on que pour épouser une femme on lui donne de l’argent ou un objet de valeur? » demande la Guemara[1]. Elle répond: « On le sait d’Abraham. En effet, la Thora utilise le même verbe pour dire épouser et pour dire qu’Abraham donne de l’argent pour acquérir une parcelle de terre à Hébron ». Ce mot est « Ki’ha », prendre. En effet, littéralement, le texte qui parle du mariage se traduit ainsi: « Un homme prend une femme »; et lors du payement par Abraham de la caverne de Ma’hpela, il donna l’argent au vendeur et lui dit: « Voici quatre cents pièces d’argent, « prends »-les ».
Quelle comparaison étonnante ! Qu’y a-t-il de commun entre un mariage et l’achat d’une terre? L’un est une acte d’union, un acte sacré, le mariage s’appelle « Kiddouchin », sanctification, l’autre n’est qu’un acte commercial.
PRENDRE PRENDRE
Le mot « prendre » se trouve de nombreuses fois dans la Thora; si la tradition a enseigné que ce sont justement ces deux versets qui doivent être mis en rapport, c’est que l’on doit en tirer un double enseignement, l’un comprendre une des dimensions du mariage, l’autre pour signifier l’acte d’acquisition par Abraham.
IL Y A « DONNER ET DONNER »
On aurait pu se méprendre et penser que le mariage est un contrat et que c’est là la raison pour laquelle un des moyens de se marier est de donner une pièce d’argent. « Non ! » dit le Talmud, la signification de cette somme d’argent est tout autre. En effet, l’argent qu’Abraham a donné à Ephron n’est pas l’acte juridique de changement de propriété car dans le droit talmudique l’argent n’est pas un moyen d’acquisition, mais un moyen de payement. Cet argent représente donc ici l’effort d’Abraham pour recevoir cette terre. Ephron était prêt à la lui donner gratuitement. Abraham ne l’a pas accepté. De même l’argent ou la bague du mariage représente l’effort que l’homme doit fournir pour mériter son épouse. Elle ne lui est pas donnée, il doit travailler pour en être digne. C’est là le symbole de l’argent. En hébreu d’ailleurs, le mot « Kessef », argent est de même racine que le mot « Kissouf » qui se traduit par désir passionné et l’effort qui en est son corollaire.
« UN ET UN » QUI FONT « UN »
Le Talmud demande dans la Guemara Sota: « D’un verset on apprend qu’un « Chidou’h » (faire rencontrer un homme et une femme en vue d’un mariage) est aussi difficile que l’ouverture de la Mer Rouge. D’autre part, un autre texte montre que rien n’est plus simple à organiser pour
D-ieu que les « Chidou’him » puisque 40 jours avant la naissance d’un enfant, sa future compagne lui est déjà désignée ». La Guemara répond ainsi: « Le premier mariage d’un homme est effectivement facile. Il n’y a qu’un personne qui lui désignée. Il suffit de provoquer une rencontre. Lorsqu’il s’agit d’un deuxième mariage, c’est déjà plus compliqué… »
Chaque homme a donc une femme qui lui est désignée, et ainsi la rencontre des futurs époux n’est en fait que des retrouvailles, leur mariage une réunification.
La similitude des mots utilisés pour le mariage et le payement de la terre nous enseigne que les efforts d’Abraham pour posséder la caverne de Ma’hpela étaient des efforts pour retrouver la terre qui lui était désignée depuis la création.
La Terre d’Israël, terre choisie par D-ieu attendait l’homme qui la méritait. C’était des retrouvailles. Et les quatre cents pièces d’argent, un témoignage d’amour.
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[1] Kiddouchin 2a