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Vayechev – L’exil et sa signification à nos yeux

Vayechev – L’exil et sa signification à nos yeux

Rav Nahum Botschko

 

Le traité Chabbat (22a) traitant de la fête de Hanoucca comporte une remarque importante – et bien connue – sur Genèse 37, 24 : « et la fosse est vide – dedans point d’eau »
« Rav Cahana a enseigné : que signifie qu’il soit écrit “et la fosse est vide – dedans point d’eau” ? Du sens des mots “la fosse est vide” ne sais-je pas qu’elle ne contient point d’eau ? Mais que veut nous enseigner la Thora en disant “dedans point d’eau” ? De l’eau, point ; mais serpents et scorpions, oui ! »
Commentant ce passage dans son commentaire des Aggadot du traité Chabbat (Eyn Aya, 14), le rav Kook y voit la profondeur de l’approche traditionnelle des Sages à l’égard de l’exil. Le midrach Tanhouma (Vayigach 10) ayant déjà remarqué le parallèle entre l’histoire de Joseph et l’histoire d’Israël, que le midrach appelle ici « Sion », nous devons comprendre que la précipitation de Joseph dans la fosse implique elle aussi une dimension prémonitoire[1] de ce qui arrive à Israël tout entier.
La fosse représente bien évidemment l’exil. Le long exil où Israël fut jeté et où il s’efforce de survivre.
Qu’est-ce qu’une fosse ? C’est un trou creusé dans le sol destiné à y recueillir de l’eau. Elle sert donc aux hommes pour étancher la soif et en cela elle leur est utile. Mais elle présente aussi des dangers. Des hommes peuvent y tomber et se blesser. Certains ont pu penser que l’exil était une fosse qui comportait certes des risques et des dangers de chute, mais, après tout, elle contient de l’eau ; l’exil aurait ainsi des dimensions qui pourraient être mises à profit. Selon les tenants de cette perspective, il est possible de se conduire en exil de telle sorte qu’Israël y gagne et en retire des bénéfices, à condition qu’Israël accepte de modifier son attitude à l’égard des goyim. Qu’il ne pense pas continuellement à ses malheurs et à sa détresse et qu’il s’efforce de se rendre aimable aux goyim ; de s’installer dans leurs pays. Alors, disent-ils, sa situation de modifiera et il réussira à tirer un grand profit de l’exil. Certes, il ya des dangers et la fosse peut entraîner des chutes, mais il suffit d’agir avec prudence et pour obtenir les gains sans subir de dommages.
Mais la vérité est tout autre et cette argumentation n’a aucune prise sur la réalité. « La fosse est vide ! » Il n’y a rien à y gagner. Aucun profit à en retirer. L’exil est stérile. Et non seulement cette fosse est vide d’eau, mais elle est pleine de nuisances dangereuses, serpents et scorpions.
En exil, Israël fait face à deux sortes de dangers porteurs de souffrances et de dommages. L’un est semblable à la morsure du serpent et l’autre à la piqûre du scorpion.
Quelle est la différence entre la morsure du serpent et la piqûre du scorpion ?
Le rav Kook fait état de deux différences. Le serpent attaque volontairement avec intention de nuire, mais ayant mordu, il devient pour un temps affaibli et ne peut plus mordre de nouveau avant d’avoir repris des forces, c’est-à-dire avoir refait ses réserves de venin. Le scorpion, quant à lui, réagit plutôt qu’il n’agit et n’a pas a priori l’intention de nuire. Mais il peut piquer et piquer d’affilée, à plusieurs reprises.
Telle est la manière dont les goyim s’attaquent à Israël en exil. Il subit des attaques provoquées par la haine, pogromes et inquisitions, l’innommable Choa et leurs émules en perpétuelle compétition. Et il y a les dommages subis par le seul fait du voisinage et de l’influence que celui-ci exerce par son mode de vie. Dommages qui se traduisent par l’assimilation et la perte d’identité. Ces dommages sont d’autant plus pernicieux qu’ils se produisent à l’insu même de ceux qui les provoquent, lorsque les goyim se montrent bien disposés à l’égard de leurs Juifs et les considèrent avec sympathie.
Au-delà de l’extraordinaire analyse du rav Kook au sujet de l’exil et de sa nature, il semble que nous puissions en apprendre une leçon importante sur la manière de considérer divers phénomènes présents dans le monde.
Il existe, dans le monde, des réalités « neutres ». Celles-ci peuvent être mises au service du bien ou du mal, et tout dépend donc de nous, car c’est l’usage que nous en faisons qui est alors seul déterminant. Emplirons nous la fosse d’eau potable ou la laisserons nous vide et découverte de sorte que quiconque qui passe éventuellement y tombe et s’y blesse ? Mais il existe aussi dans le monde des réalités nuisibles par nature. Des réalités du type serpents et scorpions. Des réalités ne possédant aucune finalité positive et dont nous devons nous écarter afin de ne pas en subir l’influence. Nous devons donc user de jugement pour déterminer la nature des réalités qui se présentent à nous et l’usage qui peut en être fait.
Prions et efforçons nous de rapprocher le temps de la Délivrance par le rassemblement des exilés et leur retour en Eretz Israël.

 

Traduit par Rav E. Simsovic
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[1] Il faut se souvenir qu’il n’y a là aucune fatalité. Le midrach met en évidence des traits généraux de l’identité d’Israël qui porte en lui la marque de ses fondateurs et qui se trouve confronté, dans les développements de l’Histoire, à des situations que la Thora a relatées à cause de leur caractère universel (NdT).

 

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